Les décisions collectives

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Avant d’amorcer un processus de décision collective, il est recommandé de considérer l’importance et la portée de la décision pour le groupe. En effet, certaines méthodes de prise de décision sont exigeantes et assez longues. Malgré les bonnes intentions, il peut être lourd et démotivant de tout soumettre à un processus de décision collective. Bien que dans certains cas il puisse être pertinent de sensibiliser le groupe à l’impact d’une décision, il se peut aussi qu’il ne s’agisse tout simplement pas d’un enjeu important pour lui. Voici un ensemble de considérations à prendre en compte relativement à cette étape importante du processus.

1-Les facteurs de démotivation pour le groupe

Au moment de l’analyse de propositions

    • Les membres ne voient pas l’enjeu ou ne se sentent pas concernés par la décision ;
    • Il y a trop d’informations, de concepts, de procédures ou de structures à comprendre avant de commencer le travail ;
    • Il n’y a pas de passage à l’action : on veut tout prévoir, tout analyser avant de tenter des
      expériences ;
    • Les participant·e·s ne possèdent pas l’information nécessaire pour faire un choix éclairé ;
    • Il n’y a pas d’outil visuel pour favoriser la mise en commun, valoriser l’analyse en groupe ;
    • Tout se passe en discussion, il n’y a pas de trace du travail accompli, rien ne situe où on est rendu, ce n’est pas concret, les membres ont l’impression de toujours parler de la même chose sans avancer ; 
    • Le groupe ne perçoit pas les nuances entre les différents problèmes, solutions ou propositions.

Au moment de la prise de décision

    • On passe son temps à remettre en question les décisions déjà prises ( rappelons que la création d’un outil visuel des décisions et du processus permet d’éviter cela ) ;
    • Les modalités de prise de décision ont été modifiées pendant l’exercice ;
    • Au fond, la décision a déjà été prise ;
    • La décision peut être renversée par une autre instance ( CA, coordination, etc. ) ;
    • Les enjeux ou la façon dont se déroule le vote amène les gens à vivre des problèmes de loyauté ;
    • Il manque d’outils ou de stratégies pour limiter l’influence des leaders ou des animatrices ; 
    • Le processus d’analyse des propositions est trop long par rapport à la portée de la décision.
2- L’analyse des propositions

Provenance des propositions
Idéalement les propositions à analyser proviennent d’un travail de réflexion mené par le groupe. En effet, lorsque les propositions sont issues des membres du groupe, le degré de compréhension est accru, ce qui facilite d’autant le travail d’analyse et favorise donc le maintien de la motivation.

Qualité des propositions

    • Elles sont issues d’un travail de réflexion du groupe ;
    • Elles sont concrètes ;
    • Elles sont formulées de façon simple et précise ;
    • Elles ont chacune des impacts réellement différents ;
    • Ce sont de bonnes propositions : elles répondent toutes au problème ; l’analyse est vraiment nécessaire pour choisir la meilleure.

Qui analyse les propositions?
On peut analyser en grand groupe ou répartir l’analyse des propositions entre des sous-groupes ou comités. À titre indicatif, un comité d’analyse ou d’expert·e·s est formé de trois à cinq personnes. Bien qu’on puisse aussi déléguer le travail d’analyse de toutes les propositions à un seul comité, il est souvent plus profitable d’impliquer tout le monde dans l’analyse, surtout si les propositions proviennent du groupe.

Comment analyser des propositions?

    • Établissez clairement les étapes concrètes du travail à faire et rendez-les visibles à tou·te·s.
    • Limitez le nombre d’étapes : trois à quatre maximum.
    • Gardez présent l’objectif commun.
    • Valorisez l’importance d’explorer toutes les facettes d’une proposition pour faire le meilleur choix.
    • Respectez le rythme du groupe tout en restant vigilant sur les possibles confusions à régler.
    • Utilisez la visualisation de l’information : tableaux de compilation, code de couleurs,
      symboles pour faciliter la mise en commun.
    • Impliquez le groupe dans le déroulement : une fois une étape terminée, demandez-lui quelle sera la prochaine étape, déléguez-lui la tâche de faire le retour sur ce qui a été accompli comme étape et le résultat obtenu.

3- La prise de décision

a ) Le pouvoir des participant·e·s
Parce que le travail s’effectue avec des personnes directement concernées par un problème, les décisions qui appartiennent en priorité aux membres portent sur :

L’identification du problème
Ex. : Il y a beaucoup de personnes analphabètes, mais on n’est pas pris en compte. Au Centre local d’emploi, ils nous aident pas pour remplir les formulaires, pour les voyagements et pour les délais.

L’identification de la situation souhaitée
Ex. : Ce qu’on veut, c’est d’être pris en compte comme personnes analphabètes.

Le choix de la revendication ( la solution ou demande concrète qui sera priorisée )
Ex. : On veut de l’aide pour remplir les formulaires au Centre local d’emploi de Pointe-Saint-Charles.

L’objectif de l’action : ce qu’on veut provoquer
Mettre de la pression sur la cible, mettre la population de notre côté ou trouver des allié·e·s.
Ex. : Malgré nos demandes répétées au gouvernement, on n’a pas d’aide. Maintenant nos actions ciblent directement le CLE de Pointe-Saint-Charles : on veut mettre de la pression sur le CLE de Pointe-Saint-Charles pour qu’il aide les gens du quartier.

Le choix de l’action en fonction de l’objectif
Ex. : On va faite une intervention ( aller porter des pétards confectionnés avec des formulaires ) au CLE pour dire que le problème est urgent.

b ) Les conditions à respecter
Peu importe le degré d’importance, certaines conditions s’appliquent si on veut que le groupe soit vraiment partie prenante des décisions.

    • Assurez-vous de la compréhension du processus
      – Le groupe comprend pourquoi il en arrive à voter et où cette étape se situe dans le travail accompli.
      – Le groupe comprend ce qui est visé, il connait le résultat attendu. Exemple : on vote entre plusieurs moyens pour trouver celui qui nous apparaît le meilleur pour porter notre revendication.
    • Évitez les éléments qui peuvent influencer le vote.
    • Lorsqu’il s’agit d’un choix entre plusieurs propositions, celles-ci doivent être d’une même nature :
      – choix entre des objectifs de l’action : mettre de la pression sur la cible, mettre la population de notre bord, trouver des allié·e·s ;
      – choix entre des actions : une intervention théâtrale, une installation interactive ;
      – choix entre des lieux : sur la rue principale, au centre d’achat, etc.
    • Idéalement, lors du vote, les propositions devraient être présentées avec le même degré de détails.
    • Le groupe possède les informations objectives suffisantes sur chaque proposition, par exemple le nombre de personnes requises, les contraintes de temps, le coût, les démarches préalables, les dangers potentiels / risques courus dans l’action, etc.
    • Utilisez des outils d’analyse.
    • Dans le cas d’un enjeu majeur, les membres du groupe ont fait une analyse des avantages et désavantages de chaque proposition ( utilisez l’outil des Trois bonnes raisons, par exemple ). Si l’analyse est bien menée, les meilleures options vont apparaître d’elles-mêmes et la décision sera plus facile.

Conception et rédaction : Nathalie Germain