Qu’est-ce qu’animer ? Animer, c’est accompagner un groupe vers l’atteinte de ses objectifs.
Le groupe souhaite agir pour améliorer sa situation. Vous utilisez votre expertise ( vos stratégies et outils d’animation ) pour mener le groupe vers son objectif de façon démocratique.
Pendant la préparation
Animer, c’est toujours un défi, et c’est un art qui se développe avec l’expérience. Mais de toutes façons, une bonne animation suppose une bonne préparation. Il faut prévoir du temps.
La première question à se poser est : Quel est mon objectif ?
Par exemple, au lieu de vous dire : « demain, on pourrait faire une activité d’impro sur le logement », demandez-vous quel est votre objectif : « à la fin de notre rencontre demain, on devrait avoir identifié trois demandes concrètes… ». Ensuite, demandez-vous quel serait le meilleur moyen pour atteindre l’objectif.
C’est l’objectif qui guide la conception de l’outil d’animation, pas le contraire.
Aller au-delà des préférences
Pour débattre afin de prendre une décision, faites attention à ce que ça ne soit pas superficiel. Demander «êtes-vous d’accord ?» n’est pas la façon la plus démocratique de faire. Ce que vous allez chercher, ce ne sont pas toujours de simples opinions personnelles ( je suis d’accord / pas d’accord avec une proposition ) ou préférences ( je préfère cette action ) ; il s’agit plutôt de savoir, par exemple, si une solution est celle qui permet le mieux de régler le problème. Donc prenez l’habitude de poser les questions en termes d’atteinte de l’objectif poursuivi par le débat et non en termes de préférences personnelles. Consultez aussi nos outils visuels.
Quelques trucs
- Pensez à créer un équilibre entre discuter, manipuler et être actif, apprendre et prendre le micro, etc. Une discussion ouverte ne devrait pas dépasser 30 minutes.
- Savez-vous que vous pouvez placer les participant·e·s de façon à faciliter l’animation ? Cela s’appelle la proxémique : par exemple, placer les personnes très loquaces près de l’animatrice permet d’intervenir plus facilement, parfois à l’aide d’un geste ; alors que rester en vue des personnes silencieuses permet de voir leurs réactions non verbales et de les encourager du regard.
- Aussi pour favoriser la parole de ceux qui parlent moins, sollicitez leur opinion ou expérience en premier, dirigez vos questions vers eux ( les questions peuvent même être fermées [oui / non] au début, si cela peut faciliter les premières prises de parole ), et mettez en valeur les contributions ou les expériences des personnes. Attendez quelques instants avant de donner la parole à ceux qui lèvent la main en premier. Cela pourrait donner le temps aux autres, moins rapides, de structurer leur pensée, amasser leur courage et lever la main. Enfin, vous pouvez demander ( avant la réunion ou à la pause ) aux personnes qui parlent trop de vous aider à faire parler celles qui parlent moins. Enfin, rappelez-vous : quelqu’un qui se répète est quelqu’un qui ne se sent pas entendu…
- Animer suppose une posture particulière qui n’est pas toujours des plus confortables, surtout avec un nouveau groupe. Par exemple, il peut être délicat de couper la parole lors d’une intervention interminable. Pour prévenir cela, il peut être très facilitant de présenter son rôle dès le départ et de demander l’accord du groupe sur ces interventions potentielles. Par exemple : « Vous êtes des gens impliqués et passionnés qui aimez discuter, mais on est un gros groupe et on a un temps limité. Est-ce que ça vous va si des fois je le dis si ça devient trop long ? Est-ce que vous me permettez d’intervenir ? »
- Respectez les silences, ils sont souvent utiles en permettant aux gens de réfléchir, de comprendre, de se positionner, etc.
- Soyez à l’écoute et utilisez ( notez et reprenez ) leurs expressions, leurs références, etc. Cela permet de respecter leur culture et de travailler à partir de leur vocabulaire ( on a souvent tendance à imposer le nôtre, qui n’est pas nécessairement compris de la même façon ). Des incompréhensions mutuelles sont souvent observées. Par exemple, une animatrice a pris longtemps à réaliser que pour les participant·e·s de son groupe, il n’était pas souhaitable d’obtenir un « revenu décent », car ils voyaient ce revenu « descendre » alors qu’ils voulaient le voir monter.
- La synthèse est une technique d’animation bien connue. Mais attention, les synthèse doivent aussi inclure les divergences d’opinions.
- Si vous utilisez la méthode du brainstorming, émettez et rappelez clairement les consignes ( ne pas critiquer ; laisser libre cours à l’imagination ; trouver le plus d’idées possible ; développer celles des autres ) et faites preuve de créativité. Par exemple, vous pouvez demander à la moitié du groupe de participer au brainstorming en se mettant dans la peau d’un personnage qu’ils auront choisi. Ou encore, posez la question avec le but renversé : comment on pourrait atteindre l’opposé de notre but actuel ? Voyez ce qui, parmi les réponses, pourrait stimuler des idées en réponse au vrai but.
Différents rôles liés à l’animation
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- Suggérer ( des façons de procéder )
- Donner la parole
- Modérer / refréner
- Stimuler / susciter / encourager la parole
- Créer de l’espace pour les silencieux
- Sensibiliser au temps
- Expliquer / ramener / clarifier
- Identifier les voies de discussion
- Questionner
- Encourager les points de vue différents
- Reformuler ou refléter
- Résumer
- Lier les idées
- Rechercher le commun ( quand polarisé )
- Chercher de l’information ( nécessaires à la prise de décision )
- Accueillir
- Valider ( légitimer une opinion ou émotion )
- Favoriser un climat d’échanges et l’écoute mutuelle
- Encourager et souligner les contributions
- Détendre l’atmosphère
- Objectiver ( les idées trop émotives )
- Vérifier, reconnaître et verbaliser les émotions ou les tensions
Comment donner les consignes relatives à une activité
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- partager l’objectif de l’activité.
- organiser les participants ( regrouper, placer ).
- attendre que ça soit fait.
- résumer le processus de l’activité.
- spécifier les règles.
- spécifier le temps imparti.
Des questions efficaces
Il est souvent admis que l’utilisation de questions ouvertes est plus efficace que l’utilisation des questions fermées ( êtes-vous d’accord ? Croyez-vous que… ? ). Bref, il est souvent préférable d’éviter les questions qui commencent par l’équivalent de « Est-ce que… ? ». Mais parfois on se demande comment remplacer ce type de question. Rappelez-vous alors de ces mots et tentez de trouver comment ils pourraient vous aider à recueillir des commentaires plus profonds, plus concrets, plus complets, plus pertinents :
Qui? Ex. : Qui profiterait d’une victoire après cette action?
Où / Quand? Ex. : Quand est-ce que vous avez senti que…
Quoi ( quel est, qu’est-ce qui, nommez les … )? Ex. : Quel lien y a-t-il entre ceci et cela? ( voir la variante 2 de l’outil Analyse de situation par catégorisation )
Comment? Ex. : Comment cette réalité a-t-elle eu un impact sur votre vie?
Pourquoi? Ex. : Pour quelle raison on choisirait cette solution / action plutôt que celle-là? ( Évitez la suite de questions «Est-ce que… / Pourquoi…» ).
Tentez de reformuler vos questions en utilisant davantage
« quand », « quel » et « comment »
Consultez l’outil sur L’évaluation pour plusieurs autres exemples de questions.
En animation efficace, il est important de poser une seule question à la fois, sur un seul élément.
Questions à se poser ( avant de poser une question! ) :
Quels résultats voudrais-je que cette question donne : une opinion, une prise de conscience, une réflexion poussée, un pas vers une prise de position ?
Encore une fois, la question choisie sera différente selon l’objectif visé.
Rédaction : Esther Filion
Sources :
Formation «Animer pour entendre tout le monde, pour aller plus loin» par Esther Filion et Nathalie Germain
Facilitator’s Guide To Participatory Decision-Making, Sam Kaner et coll., Jossey-Bass, San Francisco, 2014, 401 pages
Daniel Boisvert, F. Cossette et M. Poisson : Animateur compétent, groupes efficaces (1997).
Eric E. Vogt, Juanita Brown et David Isaacs : L’art de poser des questions efficaces. Catalyser les idées, l’innovation et l’action (2003).
Jocelyne Lavoie et Jean Panet-Raymond : La pratique de l’action communautaire, PUQ, Québec (2014)